Je suis sorti de la Manufacture, Haute école de théâtre, il y a deux ans. Une étape comme on en rencontre parfois, une transition. Petite traversée du désert. Fin du groupe, « notre beau groupe ». Sentiment violent de solitude soudaine, sensation d’illégitimité qui a fini par me faire dire « mec, rentre chez toi, redeviens maçon, menuisier, électricien, charpentier, bref retourne d’où tu viens ». Et puis en fait non. J’ai rêvé ce solo comme un match de boxe entre moi et ce putain de sentiment d’échec, une manière de mettre une bonne droite, enfin une bonne gauche, à la peur d’être hors cadre. Un combat puis un relâchement. Le trajet d’un inadapté comme les autres, qui essaye juste de trouver le courage qu’il faut pour se présenter au monde comme ça: Cyprien Colombo, 30 ans, musclé, fragile et célibataire, verseur d’eau hétéro sur les pierres chaudes d’un sauna gay, employé d’une chaîne de fast-food aussi et puis comédien. Finalement surtout comédien.
Cyprien Colombo